La Voie de la calligraphie

Tiré d’un article paru dans “La Voie du Dojo” num 16, déc 2002, Dojo zen de Nice.

Quel rapport y a-t-il entre la calligraphie et le zen ?

Au Japon tous les moines et nonnes pratiquent la calligraphie non pas comme un art, mais plutôt comme la méditation. C’est une pratique et ce n’est pas le résultat qui compte. On trace un trait et on ne rate jamais. Même si on se trompe, on ne revient pas en arrière.

Le trait est comme la vie. Le maître n’émet à aucun moment de jugement en terme de bon ou de mauvais. Il pointe directement d’après le modèle, en général tiré d’anciennes œuvres chinoises, les endroits où l’auteur de la calligraphie a manqué de concentration.

Il existe même une pratique usité dans le zen soto et rinzai, Hitsu zendo. Elle consiste à faire zazen pendant une demi-heure avant de tracer le premier trait, puis à refaire zazen une demi-heure à nouveau avant de tracer le trait suivant. Ainsi de suite jusqu’à ce que la calligraphie soit réalisée.

"Relier" Keiko Yokoyama
“Relier” Keiko Yokoyama

Comment la calligraphie est-elle enseignée au Japon ?

Dans toutes les écoles, les enfants apprennent la calligraphie une fois par semaine à partir de dix, onze ans vers la fin du cours élémentaire. Personnellement, j’ai commencé à l’âge de six ans plutôt par obligation et par tradition. Beaucoup de membres de ma famille du côté de mon père étaient calligraphes. Je ne comprenais pas très bien au début pourquoi je devais y aller. Les séances se déroulaient dans la demeure d’un maître. Cela avait un côté rébarbatif, car il fallait se plier à tout un rituel. Saluer le maître en rentrant, s’asseoir en seiza pendant toute la séance sans bouger ni parler sauf pour prendre une nouvelle feuille de papier ou se rendre sans bruit auprès du maître pour lui faire part d’une difficulté.

Pas question de lever le doigt et d’exposer tout haut ce qu’on avait à dire devant toute l’assemblée ! La préparation de l’encre obtenue en frottant le bâton d’encre contre la pierre contenant l’eau faisait également partie du cérémonial. Cela préparait l’esprit en même temps que l’odeur diffusée dans toute la pièce le calmait. Au début, pendant les quatre ou cinq premières années de l’apprentissage, le maître prend la main de l’élève et on bouge ensemble. Cela m’a laissé une impression très forte.

Au Japon, il existe aussi des centres de formation à la calligraphie où ce rituel est occulté, ce n’est pas la voie traditionnelle.
On peut dire qu’il y a deux courants : la calligraphie traditionnelle, toujours noir sur blanc avec le sceau rouge. Qui exige l’acquisition de techniques et la connaissance des 3000 caractères de base et la calligraphie moderne, acceptant les couleurs, où l’on joue avec l’encre en partant du caractère.

Ces deux écoles ne font pas vraiment bon ménage. Pour les puristes, la calligraphie moderne n’a pas l’esprit juste. Pourtant, pour faire de la calligraphie moderne, il vaut mieux être passé par la voie traditionnelle.

La calligraphie moderne est peut-être un peu comme l’art abstrait, accessible aux occidentaux qui ne connaissent pas les caractères.

Aujourd’hui, j’enseigne la calligraphie de la manière traditionnelle, car je me rend compte de la valeur de l’enseignement que j’ai reçu à l’âge de mes filles. J’enseigne également à d’autres enfants, mais je m’adapte à l’esprit occidental.

Rencontre avec Keiko Yokoyama Calligraphe / propos recueillis par M. Hocine
@keikoyokoyama7707

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